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A ce jour, le continent africain est loin d’avoir été le plus touché par la pandémie de COVID-19, bien au contraire. Les raisons sont multiples et résident sans doute dans la jeunesse des populations africaines et une moindre exposition aux flux de la mondialisation. A cela s’ajoute l’expérience pandémique des Etats africains, exposés plus que d’autres à des maladies contagieuses (paludisme, fièvre jaune, etc.) ou ayant été confrontés, pour certains, à des épisodes pandémiques récents (Ebola).
Si le recul manque encore pour tirer les conclusions de la gestion de la pandémie par les systèmes de santé africains, cette crise sanitaire est l’occasion de faire le point sur l’environnement règlementaire de la santé en Afrique. L’harmonisation des législations, gage d’efficacité, est en effet un élément fondamental dans la lutte contre les pandémies.
Des avancées déjà anciennes en matière d’harmonisation règlementaire et de libre circulation
Dans les nombreuses organisations internationales que compte l’Afrique, certaines législations harmonisées n’ont jamais abordé le domaine de la santé. C’est le cas de l’OHADA, qui est pourtant un modèle du genre.
En revanche, l’UEMOA, par exemple, a réalisé depuis les années 2000 un travail important en matière d’harmonisation des législations et de reconnaissance mutuelle. Plusieurs directives ont été prises pour faciliter la libre circulation et l’établissement de professionnels de santé (médecins, pharmaciens, vétérinaires), ou pour harmoniser les procédures de mise sur le marché et de surveillance des produits de santé (homologation des produits pharmaceutiques à usage humain). S’y ajoutent des décisions instituant des instances régionales (comité régional du médicament vétérinaire, par exemple), ou mettant en œuvre des lignes directrices pour l’homologation de produits de santé (par exemple, en matière de compléments nutritionnels).
Ces avancées, réelles, laissent toutefois un goût d’inachevé. L’harmonisation, par exemple, des informations de surveillance épidémiologique publiées dans les rapports de santé publique est un outil fondamental pour la surveillance mondiale des pandémies. L’OMS s’est d’ailleurs plainte, dans la mise à jour de sa stratégie de lutte contre la COVID-19 publié le 14 avril 2020, des lacunes mondiales en la matière. L’Afrique n’est toutefois pas la dernière en la matière, puisque, depuis 2014, le programme REDISSE (renforcement du système régional de surveillance des maladies) vise à améliorer les systèmes de santé et la veille sanitaire dans 16 pays d’Afrique de l’Ouest et centrale.
Persistance de lacunes dans les systèmes de santé nationaux
La réalité des systèmes de santé, sur le terrain, est très contrastée. Le cas du Bénin, qui a ainsi fait l’objet d’une étude publiée sur le site du village de la justice, est assez révélateur. L’auteur y décrit les structures hospitalières de bon niveau, qui dispensent toutefois des soins dont le coût est hors de portée du patient moyen.
A côté, il décrit les centres de santé « qui ont surgi à tous les coins de rue », et dans lesquels « on ne s’embarrasse pas des règles élémentaires », en conséquence de quoi « n’importe quel individu sans qualification se permet d’ouvrir un centre de santé et d’y dispenser des soins » dans la mesure où « les organismes de contrôle ne jouent pas leur rôle ». Il existe donc, sous-jacente, une difficulté dans l’application des normes, avec, au bout du chemin, une mise en danger des patients.
L’Afrique nous surprendra
La banque mondiale elle-même le soulignait au mois d’avril 2020 : l’Afrique, ayant tiré les leçons d’Ebola, a su réagir efficacement face à la pandémie de coronavirus. L’exemple de l’institut Pasteur de Dakar est parlant : dès janvier 2020, ses équipes ont commencé à se prépare à la pandémie « car le laboratoire est habitué à traiter des flambées épidémiques similaires ».
Tout est dit. Contrairement à d’autres régions du monde, l’Afrique et ses habitants savaient déjà que nul n’est invulnérable face aux grands épisodes épidémiques. Ainsi, paradoxalement, disposant de moyens matériels et d’outils réglementaires considérablement plus limités qu’ailleurs, les pays d’Afrique ont adopté une réaction adaptée à la pandémie. Peut-être faut-il y voir une autre raison du développement limité du coronavirus dans cette région du monde.
ENGLISH VERSION
Thus far, the African continent is far from being the most affected by the COVID-19 pandemic, and in fact quite the opposite is the case. There are many reasons for this, and which stem from the youth of African populations and the fact of being less exposed to the flow of globalization. To this should be added the experience of African countries as far as pandemics are concerned, and which are more exposed than other countries to contagious diseases (polio, yellow fever, etc.), or having been confronted, in the case of certain countries, to recent pandemic outbreaks (Ebola).
Whilst it is perhaps still too early to draw conclusions regarding the managing of the pandemic by African healthcare institutions, this health crisis an opportune time to take stock as regards the healthcare regulations environment in Africa. The harmonization of legislations, a guarantee of efficiency, is a fundamental element in the fight against pandemics.
Advances that have already been made regarding regulatory harmonization and freedom of movement
In the numerous international organizations that exist in Africa, certain legislations that have been harmonized have never dealt with the area of healthcare. This is the case with OHADA, which is nonetheless taken as a model of harmonization.
On the other hand, WAEMU, for example, and since 2000, has carried out important work regarding the harmonization of legislations and mutual recognition. Several directives have been issued in order to facilitate the freedom of movement and the putting in place of healthcare professionals (doctors, chemists, vets), or to harmonize the procedures for placing healthcare products on the market and controls of healthcare products (approval of pharmaceutical products that are for human consumption). Added to this are the decisions that put in place regional authorities (for example, the regional committee for veterinary medicine), or that put in place guidelines for the approval of healthcare products (for example, regarding nutritional supplements).
These advances, which are very real, are nevertheless incomplete. For example, the harmonization of information on epidemic control published in public health reports is a very important tool for the global surveillance of pandemics. Moreover, the WHO has complained, in the update of its strategy in the fight against COVID-19 published on 14 April 2020 with regard to global gaps in this area. Africa is not however last in this area, given that since 2014, the Regional Disease Surveillance Systems Enhancement (REDISSE) – Procurement Plan seeks to improve healthcare systems and healthcare surveillance in 16 countries in Western and Central Africa.
Persistent gaps in national healthcare systems
The reality of healthcare systems, on the ground, is very different. The example of Benin, which has been the subject of a study published on the website of “Village de la Justice”, is quite revealing. The author describes hospital structures that are of a good standard, but which nevertheless dispense treatment the cost of which is beyond the reach of the average patient.
On the other hand, he describes healthcare centers “that have emerged on every street corner” and where “basic rules are not adhered to”, and as a result of which “any unqualified individual can open a healthcare center and dispense treatment” to the extent that “control bodies do not play their roles”. There therefore exists an underlying difficulty in the application of norms with, at the end of the day, the endangering of patients.
Africa will surprise us
The World Bank has itself stressed in April 2020: Africa, having learnt lessons from Ebola, has known how to react efficiently faced with the coronavirus. The example of the Pasteur Institute in Dakar is revelatory: as from January 2020, its teams started to prepare for the pandemic “as the laboratory is used to treating similar epidemic outbreaks”.
There is nothing to add. Unlike other areas in the world, Africa and its inhabitants already know that no one is invincible when faced with large epidemic outbreaks. Thus, paradoxically, whilst possessing equipment and regulatory tools that are considerably more limited than elsewhere, countries in Africa have adopted a response that is adapted to the pandemic. Perhaps this is another reason for the limited spread of the coronavirus in this region of the world.
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