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Le traité portant création de l’Agence Africaine du Médicament (AAM) est entré en vigueur le 5 novembre 2021. L’ambition, la vision et les objectifs de l’AAM ont été beaucoup commentés. Mais le traité est plus révélateur encore en raison de son contenu.
L’architecture institutionnelle
Les dispositions du Traité AAM sont en apparences très classiques. On y trouve les objectifs de l’Agence, les principes directeurs, ses fonctions, son statut juridique, son siège.
Egalement, l’architecture institutionnelle de l’AAM est prévue par le Traité, avec ses principaux organes, leur composition, leur mode de fonctionnement. Sans surprise, le Traité traite également des ressources financières de l’Agence. Pourtant, une lecture attentive du Traité révèle des particularités riches de sens.
L’affirmation des spécificités africaines
La source d’inspiration du traité semble être l’Agence européenne du médicament (EMA) et le droit dérivé de l’Union européenne. Par exemple, la définition du dispositif médical à l’article 2 du Traité est manifestement inspirée par celle retenue par l’Union européenne. Cette catégorie venait d’ailleurs initialement du droit anglo-saxon.
Pourtant, derrière cette façade, le traité portant création de l’AAM contient quelques détails très révélateurs de l’affirmation de l’expérience de l’Afrique en matière de médicaments. Ainsi, l’article 2 du traité prévoit une définition du « produit médical traditionnel », qui renvoie à la « pratique sanitaire traditionnelle » et l’utilisation par celle-ci de produits de diagnostic, de traitement ou de prévention des maladies, ou également, « tout objet curatif ou thérapeutique » utilisé à cette fin, ce qui correspond à une définition particulièrement large. Seuls les substances ou médicaments entraînant une dépendance ou dangereux sont exclus de cette définition.
Cette catégorie est originale et totalement ignorée du droit européen. La Directive 2001/83/CE mentionne simplement les traditions homéopathiques de certains Etats-membres, mais il s’agit de la seule concession à la médecine alternative. L’article 2 du traité portant création de l’AAM est donc très spécifique et illustre une spécificité africaine.
Les limites de cette notion… et son avenir
Il est permis de s’interroger sur les contours de cette notion. En effet, l’Afrique est une terre de contraste, et les pratiques sont très différentes, ce qui permet de supposer une absence d’homogénéité de cette notion qui pourrait être comprise différemment par exemple en Afrique du Nord et en Afrique sub-saharienne. Il sera nécessaire, pour cette Agence nouvelle, de produire du droit dérivé pour préciser les contours de cette notion spécifique.
Il est possible d’envisager, sur ce fondement, que ce cadre légal pourrait à l’avenir encadrer une réalité existante : celle des médecines alternatives africaines. Encadrée par la règlementation des produits de santé, la médecine traditionnelle africaine pourra ainsi explorer des domaines ignorés de la science moderne des produits de santé.
D’un point de vue général, cette particularité du Traité AAM est révélatrice de l’émergence d’une prise en compte de l’expérience africaine en matière de produits de santé. Ceci augure des développements intéressants pour l’avenir.
English version
The treaty establishing the African Medicines Agency (AMA) entered into force on November 5, 2021. The AMA’s ambition, vision, and objectives have been widely discussed. But the treaty is even more revealing because of its content.
Institutional architecture
The provisions of the AAM Treaty appear at first sight very conventional. They include the Agency’s objectives, guiding principles, functions, legal status, and headquarters.
The Treaty also provides for the AAM’s institutional architecture, including its main bodies, their composition, and operating procedures. Unsurprisingly, the Treaty also addresses the Agency’s financial resources. However, a careful reading of the Treaty reveals significant specificities.
The affirmation of the African experience
The Treaty’s inspiration appears to be the European Medicines Agency (EMA) and the European Union’s secondary legislation. For example, the definition of medical device in Article 2 of the Treaty is clearly inspired by that adopted by the European Union. This category, in fact, originally came from Anglo-Saxon law.
However, behind this facade, the treaty establishing the AAM contains some very revealing details of the affirmation of Africa’s experience in medicines. Thus, Article 2 of the treaty provides a definition of “traditional medical product,” which refers to “traditional health practice” and its use of products for the diagnosis, treatment, or prevention of diseases, or also, “any curative or therapeutic object” used for this purpose, which corresponds to a particularly broad definition. Only addictive or dangerous substances or medicines are excluded from this definition.
This category is unique and completely ignored by European law. Directive 2001/83/EC simply mentions the homeopathic traditions of certain Member States, but this is the only concession to alternative medicine. Article 2 of the treaty establishing the AAM is therefore very specific and illustrates an African experience.
The limits of this notion… and its future
We have to question the contours of this notion. Indeed, Africa is a land of contrasts, and practices are very different, which suggests a lack of homogeneity in this notion, which could be understood differently, for example, in North Africa and sub-Saharan Africa. It will be necessary for this new Agency to produce secondary legislation to clarify the contours of this specific notion.
On this basis, it is possible to envisage that this legal framework could in the future regulate an existing reality: African alternative medicines. Framed by the regulation of health products, traditional African medicine will thus be able to explore areas ignored by modern health product science.
From a general perspective, this particularity of the AAM Treaty is indicative of the emergence of a consideration of the African experience in the field of health products. This augurs interesting developments for the future.
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